>
|
|
![]() |
|||||
Allumage dans la salle de bains
'Hannoucah 5711, 1950
La répression
stalinienne était au plus fort. Tout individu suspect d'être
un ennemi du gouvernement était pourchassé, "jugé",
emprisonné ou déporté en Sibérie, ou parfois disparaissait
à tout jamais. Les juifs étaient notamment visés par
cette chasse aux "ennemis du peuple".
Le
Rav Its'hak Silber habitait alors à Kazan, dans le Tatarstan.
Sa situation matérielle était difficile, et malgré son
salaire et celui de sa femme il était obligé parfois de recourir
à un emprunt auprès de ses amis.
Un soir où il était parti rembourser sa dette chez un de ses
amis, il y fut accueilli à sa grande surprise par un policier qui le
fit rentrer, puis verrouilla la porte. L'appartement était sans dessus
dessous. Les policiers avaient jeté tout le contenu des armoires au
sol, retourné les lits et les tiroirs.
Ils ne trouvèrent rien de suspect, et décidèrent de s'intéresser
au visiteur.
Ils l'emmenèrent chez lui, et se livrèrent à une inspection
en règle, c’est-à-dire qu'ils renversèrent toute
la maison.
Ils trouvèrent sous un matelas des choses accablantes: des bons du
Trésor.
(Le gouvernement soviétique avait émis un emprunt … obligatoire,
garanti par des reconnaissances de dette, ne mentionnant pas de date de remboursement.
De temps en temps était organisé un tirage au sort, et les prêteurs
étaient partiellement remboursés. Le devenir de ces reconnaissances
de dette était très aléatoire, et les possesseurs s'en
débarrassaient au marché noir pour toucher un peu d'argent.
C'était bien sûr interdit…)
Un des amis du Rav Silber avait acheté des bons du Trésor, et
s'était dit que la police n'irait pas fouiller chez le Rav. Et s'il
arrivait quoi que ce soit, il irait clamer sa pleine responsabilité
auprès de la police.
Lorsque cet ami apprit la nouvelle de l'arrestation du Rav Silber, il se précipita
au poste de police pour disculper le Rav.
Mal lui en prit: le Rav était maintenant accusé de faire partie
d'un réseau mafieux, et fut condamné à deux ans de travaux
forcés en Sibérie.
La vie était très dure dans le camp, mais le Rav Silber fit
tout son possible pour maintenir sa vie juive. Il gardait Chabbat et pratiquait
toutes les Mitsvoth qu'il pouvait, au péril de sa vie.
'Hannoucah approchait. Où trouver des bougies? Qui dans ce camp pouvait
se procurer des bougies?
Finalement, il pensa à Dobrovistky, un peintre juif de Vilna. Il était
somme toute assez proche des dirigeants du camp, au point d'être considéré
comme un délateur par les autres prisonniers.
Malgré tout, Silber alla parler à Dobrovistky de la fête
de 'Hannoucah et de son désir d'allumer des bougies. C'était
la première fois qu'il entendait parler de cette fête, mais le
discours chaleureux de Silber réussit à le convaincre de l'aider.
Il réussit à mettre la main sur une grande bougie, qu'il donna
à Silber, à sa plus grande joie.
Il coupa la grande bougie en huit morceaux, destinés à brûler
une demi-heure, temps suffisant pour être acquitté de la Mitsvah.
Il regrettait de ne pas pouvoir allumer chaque soir une bougie supplémentaire,
mais se résolut à allumer une seule bougie chaque soir.
Mais où les allumer sans que les surveillants le surprennent? Le surveillant
passait dans les chambres tous les quarts d'heure, et les bougies devaient
durer une demi-heure…
Finalement, il décida d'allumer dans … la salle d'eau. Le camp
avait deux salles d'eau. Une avait des douches, l'autre seulement des lavabos,
et les prisonniers ne s'y lavaient que la partie supérieure du corps.
On pouvait donc réciter des bénédictions dans cette seconde
salle d'eau.
Le premier soir de 'Hannoucah, le Rav Silber réunit une quinzaine de
prisonniers juifs dans la salle d'eau, verrouilla la porte, et répandit
de l'eau partout, en veillant à ce que l'eau sorte sous la porte.
Avec beaucoup d'émotion le Rav récita les trois bénédictions
du premier soir, puis alluma. Silencieusement tous chantèrent des chansons
de 'Hannoucah.
Au bout d'un quart d'heure, le surveillant frappa à la porte pour rentrer.
Tous retinrent leur respiration, dans l'attente du pire.
"Je suis en train de laver le sol, reviens tout à l'heure…"
C'est ainsi que Rav Silber "lava" la salle d’eau durant huit
jours, et accomplit la Mitsvah de l'allumage des bougies au cœur d'un
camp communiste.
Traduit
de
http://www.chabad.org.il/Magazines/Article.asp?ArticleID=17499&CategoryID=2666
D'après "Rester juif".