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Les fêtes juives Un dossier Alliance Réalisé par Aharon |
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De deux
choses, l'une...
Kislev
est un mois très joyeux, notamment dans le monde 'Hassidique. Outre 'Hannoucah,
il recèle également diverses dates soulignées dans le calendrier
'hassidique, dont le 19 Kislev, jour de la disparition de ce monde du Maguid
de Mézeritch, mais aussi libération des prisons tsaristes de son
élève le Rabbi Chnéour Zalman de Liady, Maître de
la 'Hassidouth 'Habad.
Revenant sur les circonstances de l'arrestation de Rabbi Chnéour Zalman
le Rabbi de Loubavitch raconte dans une conversation du Chabbat 'Hayé
Sarah 5711:
Lorsque les soldats vinrent arrêter le Admour Hazaken, il s'est dans
un premier temps caché, pour accomplir le verset "cache toi un peu, le
temps que la colère se calme" (Isaïe, 26, 20). Par la suite, le
Rav Chmouel Munkès conseilla au Rabbi de ne pas se cacher et de suivre
les soldats lorsqu'ils se représenteraient. Le Rabbi lui fit remarquer
que c'était là un danger, mais le Rav Chmouel Munkès lui
déclara: "De deux choses, l'une. Soit vous êtes un Rabbi, ils ne
peuvent pas vous nuire, et si non, comment avez vous osé ôter le
plaisir de la vie à des milliers de 'Hassidim?"
Le Rabbi avait effectivement retiré, ou au moins diminué, à
des milliers de juifs le plaisir des bonnes choses afin qu'ils puissent arriver
à la connaissance de D.ieu.
Les 'Hassidim racontent plus en détail ce que fut l'intervention de Rav
Chmouel Munkès.
Un haut officier se présenta durant 'Hol Hamoed Souccot 5559 (1798) pour
arrêter Rabbi Chnéour Zalman. Le Rabbi eut le temps de s'enfuir
par la porte arrière. Il avait décidé de prendre le temps
de réfléchir et s'entretenir avec ses proches avant de se rendre
à la police. L'officier fit savoir qu'il se présenterait dans
quelques jours, après la fin de la fête, pour arrêter le
Rabbi.
Parmi les personnes qui s'entretinrent avec le Rabbi figurait Rav Chmouel Munkès.
Malgré sa réputation de pitre attitré, c'était un
des 'Hassidim les plus attachés au Rabbi, connu tant pour la profondeur
de sa réflexion que pour ses propos tranchants.
Il demanda au Rabbi la permission de raconter une histoire.
"Le Tsaddik Rabbi Mena'hem Mendel de Vitebsk avait l'habitude de se rendre une
fois par an chez son maître, le saint Maguid de Mézeritch, Rabbi
Dov Ber, à l'approche de Pessa'h.
Il
avait un cocher habituel, qui l'emmenait à Mézeritch sans bourse
délier. Mais cette année là, notre homme n'avait pas fait
des bonnes affaires et hésitait à s'absenter pour tant de temps
à l'approche d'une fête au demeurant fort coûteuse. Il laissa
entendre au Rabbi qu'il préférait rester à Vitebsk et gagner
quelques roubles de plus qui seraient les bien venus à la maison.
Rabbi Mena'hem Mendel le rassura complètement. Il fallait faire confiance
à D.ieu, et dans tous les cas il lui suffirait de vendre un de ses deux
chevaux pour que sa femme puisse préparer tout le nécessaire pour
un Pessa'h convenable.
Notre cocher accepta et après avoir vendu un cheval en laissa l'argent
à sa femme, puis se mit en route, cahin-caha.
Quelle route! Si le chemin était d'habitude difficile, il l'était
maintenant deux fois plus avec cette charrette qui traversait vallées
et montagnes, forêt et marécages attelée à un seul
cheval.
La descente d'une montagne s'avéra fort difficile. Connaissant le sentier,
le cocher descendit de son siège et guidait prudemment le cheval dans
les ornières du chemin, entre le ravin et la montagne, retenant le cheval
par les rênes.
"Pourquoi es tu descendu
de ton siège, et pourquoi aller si lentement?" s'impatienta Rabbi Mena'hem
Mendel, que le changement d'allure avait tiré de ses pensées.
"Fouettes le cheval, il faut se hâter!"
Le cocher ne se posa pas de question. Il remonta sur son siège, agita
le fouet, et le cheval repartit au galop.
Au bout du chemin, en bas de la route, la superbe propriété d'un
seigneur, entourée d'un beau jardin, de serres, et un magnifique portail
qui vola en éclat. Le cocher n'avait pu retenir le cheval, poussé
par la charrette, et la cavalcade s'était terminée dans les serres,
au milieu d'éclats de verre.
Le seigneur sortit de son manoir en rugissant, le fusil à la main, et
se dirigea droit vers le cocher. Notre homme terrorisé pointa le doigt
vers le Rabbi, comme pour désigner le responsable de ce désastre.
Le seigneur dirigea le canon vers Rabbi Mena'hem Mendel, et tenta d'appuyer
sur la gâchette. Mais rien ne bougea. Il sentit son doigt engourdi, douloureux.
Sa main était paralysée. C'était son tour d'être
terrorisé. Il poussa un cri terrible. Il avait compris qu'il avait en
face de lui un saint homme et marmonna quelques excuses sur sa façon
de réagir. Rabbi Mena'hem Mendel lui fit signe que l'affaire était
close et qu'il pouvait rentrer chez lui.
Après que le cocher eut remis sa charrette en état et ait repris
la route, Rabbi Mena'hem Mendel se tourna vers lui.
"Comment as tu osé me désigner à cet homme comme responsable
de cette affaire? N'as tu pas craint qu'il me tire dessus?"
Notre cocher était un homme simple, mais direct.
"Rabbi Vous m'avez conseillé de vendre mon cheval, je l'ai vendu. Vous
m'avez conseillé de laisser l'argent à ma femme et de vous emmener,
je l'ai fait. Lorsque nous sommes arrivés à cette pente dangereuse,
où la prudence recommande d'avancer lentement, vous m'avez demandé
d'aller plus vite, je l'ai fait. Je me suis donc dit que si vous êtes
un grand Tsaddik, rien ne peut vous arriver. Et si non, n'est il pas juste que
vous assumiez les conséquences de tout ceci?"
Rav Chmouel Munkès termina ici son histoire et se tourna vers le Admour
Hazaken.
"Rabbi, vous avez introduit une nouvelle voie dans le service de D.ieu, l'annulation
de soi même, la soumission de nos propres volontés ou désirs
devant la parole divine, un dévouement entier devant le Créateur.
De deux choses l'une: si vous êtes effectivement un Rabbi, il n'y a aucune
crainte à avoir, car il ne peut vous arriver aucun mal. Et si non, de
quel droit avez vous ôté à tant de juifs la perception des
plaisirs de ce monde ci?"
Aharon