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Rabbi Avraham
Yehouchoua Heschel Twerski, Admour de Machnowka (Ukraine) (24 Adar 1895 -
10 Tishrei 1987) reçut un jour la visite d'officiels russes. C'était
dans les années 50, et le Gouvernement communiste avait besoin de prouver
que les juifs jouissaient du libre exercice de leur religion.
"Nous sommes venus vous proposer le poste de Grand Rabbin de Russie"
Rabbi Avraham était le "Rebbe" des 'Hassidim de Machnowka
en Ukraine, depuis l'âge de 22 ans. Il comprit tout de suite la manœuvre
que les communistes tentaient.
Il déclina immédiatement la proposition, dont le but était
une mise au pas des opposants juifs orthodoxes à la ligne gouvernementale,
et un leurre pour l'opinion publique internationale.
Mais les émissaires des autorités revinrent à plusieurs
reprises pour lui faire la proposition.
Il eut beau se défendre qu'il n'était pas "Rav" et
donc inapte à occuper un poste central comme celui-là, les propositions
se multiplièrent. Il est vrai qu'un poste aussi important, avec un
revenu assuré, un appartement et une voiture de fonction n'étaient
pas des arguments négligeables.
Il fut finalement convoqué par le Ministre de la Culture en personne,
qui ne manqua pas de souligner tous les avantages qu'il pourrait tirer de
ce poste. Au début, le Rebbe avança divers arguments pour expliquer
son refus. Mais comme le Ministre insistait, il lâcha le fond de sa
pensée:
"Un rabbin comme vous en cherchez, je ne suis pas prêt à
l'être. Un rabbin comme j'entends l'être, vous n'êtes pas
prêts à l'accepter".
Le sourire feint sur le visage du Ministre disparut, cédant la place
à une expression de colère.
"Vous me le paierez, et au prix fort" lança t-t-il.
Il reçut cependant d'autres propositions, qui trahissaient le besoin
que le Gouvernement avait de sa personne et de sa personnalité. Mais
rien n'y fit.
Le Rebbe y mit fin en montrant son cœur "même si vous me menacez
d'un pistolet, sachez que je n'accepterai pas ce poste".
Le Chabbath suivant, vers minuit, on vint frapper à sa porte. Avant
même que quelqu'un ait le temps d'ouvrir la porte, elle fut enfoncée
par les sbires de la police secrète.
Il s'ensuivit une fouille destructrice de tout l'appartement, puis le Rebbe
reçut l'ordre de les suivre.
Les jours suivants il subit des interrogatoires de plus en plus agressifs.
Il fut torturé selon
toutes les règles de cet art où la police communiste était
passée maïtre, mais ne leur donna aucun des renseignements qu'ils
espéraient obtenir. Lorsqu'ils comprirent qu'ils n'en tireraient rien,
il fut jugé comme personnage indésirable, et envoyé en
Sibérie pour cinq ans.
Là bas, il devait se présenter régulièrement au
bureau du KGB, pour signer un acte de présence.
Peu de temps après son arrivée en Sibérie, il reçut
une convocation pour le Chabbat, Roch Hodech Elloul. Il s'y rendit, mais refusa
de signer les documents présentés.
C'est Chabbat aujourd'hui! Je n'ai pas le droit de signer. Je repasserai ce
soir pour signer.
Le préposé le regarda, incrédule.
"Tu sais que tu es en Sibérie, ici?"
Mais le Rebbe ne se laissa pas impressionner.
"Je ne signerai pas! "
L'officier, qui n'avait jamais rencontré la moindre résistance
de la part des exilés fit appel à son supérieur.
Celui arriva, flanqué de ses deux gros chiens dont le seul aspect aurait
suffit à ramener à la "raison" un récalcitrant.
Le Rebbe répéta tranquillement: "aujourd'hui c'est Chabbat,
et je ne signerai pas avant ce soir".
L'homme devient rouge de colère.
Ici c'est la Sibérie, il n'y a pas d'alibi comme ça. Et celui
qui s'entête, on en termine vite avec lui.
Le Rabbi ne perdit pas son calme. Il ouvrit les boutons de son manteau, et
tourna un visage enflammé vers l'officier russe.
"Vous pouvez tirer, mais je ne signerai pas pendant Chabbat".
L'officier enrageait. Il sortit son pistolet et le dirigea vers Rabb Avraham,
qui ne broncha pas.
Il appuya sur la gachette une fois, deux fois, trois fois. Le Rabbi était
encore debout, mais le policier qui était à côté
se tordait de douleurs. Pour une raison mystérieuse, les balles avaient
dévié et touché le voisin ...
La main qui tenait le pistolet se mit à trembler. L'officer russe était
pâle comme un linge, et il se mit à trembler de tout son corps.
Il éclata en sanglots et d'une voix hachéee murmura "Saint
Rabbi, pardonnez moi, moi aussi je suis juif..."
Il
se jeta aux pieds du Rabbi qu'il avait juste avant essayé de tuer,
et le supplia de lui pardonner.
"Je ferai tout ce que vous me demandez. Si vous avez besoin d'un Mynian
et un Sefer Torah pour les prières de Roch Hachanah et Yom Kippour
..."
J'aimerais que tu me procures un Choffar répondit le Rabbi avec calme,
comme s'il ne s'était rien passé.
Nul ne sait d'où il le sortit, mais quelques jours avant Roch Hachanah
l'officier fit parvenir à Rabbi Avraham un Choffar.
Traduit de
Sihat Hachavoua N° 1417, 5774
Adapté de "Leovdekha beemeth"