Les fêtes juives

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Extrait de "En commentant la Parachah"
Compilation des notes hebdomadaires de Gérard Touaty
Parues dans Actualité Juive.
Avec la permission de l'auteur.
Parachah Devarim


En attendant le troisième Temple
Nous sommes rentrés depuis quelques jours dans la sombre période appelée par nos Maîtres "be'in hametsarim" (1) et qui évoque pour nous la destruction des deux Temples de Jérusalem (2). A ce propos nous vous invitons à réfléchir sur deux thèmes en rapport avec ces événements pour tenter d'en dégager une portée actuelle.
Quand le Temple et les cœurs brûlaient
Le Talmud (3) nous raconte que quelques temps avant la chute du second Temple, Rabbi Yo'hanan Ben Zakaï usa d'un subterfuge pour pouvoir sortir de Yerouchalaïm (Jérusalem).
Lorsqu'il y parvint, il se présenta devant Vespasien, qui faisait le siège de la ville, en le saluant comme roi. Vespasien n'était pas roi, mais juste à ce moment un courrier arriva de Rome lui annonçant que l'empereur était mort et que les nobles de Rome l'avaient désigné à la tête de l'Empire.
Une seconde remarque du Rabbi démontra au nouveau monarque qu'il avait devant lui un homme exceptionnel. "Si tu as une faveur à me demander, je te l'accorderai", proposa-t-il aussitôt à Rabbi Yo'hanan.
Rabbi Yo'hanan demanda trois choses. Deux d'entre elles étaient des requêtes personnelles, mais la première avait une dimension qui dépassait le cadre de sa personne : "Donne moi la ville de Yavné avec tous ses Sages ", demanda-t-il à Vespasien. Que devons-nous lire à travers cette demande ? Le Temple, repère unificateur d'Israël est sur le point de tomber. Dans la ville qui l'abrite, des querelles intestines entre Juifs donneront encore plus de force à l'assaillant pour venir à bout de Yerouchalaïm. Bien évidemment lorsque les forces donnent encore la volonté de se battre, l'espoir est permis ou plutôt personne ne veut et ne peut porter son regard et sa réflexion au-delà de l'instant présent pour envisager le drame. Un homme pourtant comprit que l'issue fatale était inéluctable. Il comprit qu'au-delà d'une identité nationale en fai11ite, une seule voie était à préserver : celle de l'étude de la Torah. Quand le peuple juif engage son destin sur un chemin politique communautaire ou moral qui le conduit tôt ou tard à menacer sa propre existence, il faut voir là l'indice d'un manque : celui de l'étude de la Torah capable d'unifier les cœurs. Nous sommes tous aujourd'hui des "Rabbi Yo'hanan Ben Zakaï". Nous sommes tous aujourd'hui les témoins d'une communauté ruinée par les conflits où l'intérêt de la collectivité est méprisé au profit de rivalités personnelles. Alors comme le fit Rabbi Yo'hanan, il faut, par l'étude, reconstruire et laisser derrière soi le Temple en feu. Et qu'importe si le nouveau combat est solitaire et difficile. L'important est de favoriser l'étude de la Torah. D.ieu fera le reste.
Le Temple que nous avons détruit
Toute génération dans laquelle le Temple de Yerouchalaïm n'a pas été reconstruit est à considérer comme si elle-même l'avait détruit. Cette affirmation du Talmud (4) vient troubler fortement notre conscience. Nous n'étions pas présents lors de cet événement mais nous serions, néanmoins coupables.
Lorsque nous tentons de résoudre un problème, nous n'envisageons bien souvent que ses conséquences, sans faire l'effort de comprendre ses origines, par paresse intellectuelle ou pour se voiler la face. L'exemple du sida est à cet égard très significatif. On dépense des millions de francs en publicité et recherche médicale alors qu'il existe de toute évidence une perversion morale à la base de cette maladie, perversion que personne n'osera dénoncer. Pour un Juif, le Talmud nous trace la voie : si un homme est assailli de malheurs, qu'il fasse une introspection intérieure pour y déceler une conduite répréhensible qui serait la cause de sa situation présente (5). Si l'on veut réparer, il faut rechercher la racine du mal et à partir de là prendre un nouveau départ Le Temple de Yerouchalaïm fut détruit à cause de la haine gratuite qui régnait alors entre les Juifs (6). S'il n'est toujours pas reconstruit c'est que la cause de sa destruction (la haine gratuite) n'a toujours pas été arrachée de nos cœurs. La responsabilité est en quelque sorte partagée par toutes les générations ! On aura compris dès lors que seul l'amour gratuit envers un autre Juif pourra hâter la reconstruction du Troisième Temple. Très bientôt.
Notes
(1) Expression signifiant "entre les étroits défilés", selon le verset des Lamentations chap. 1, verset 3 : "...ses persécuteurs l'ont tous atteint dans les étroits défilés".
(2) Le 9 du mois de Av.
(3) Traité Guitine p. 56b.
(4) Talmud de Yerouchalaïm.
(5) Traité Berakhoth p. 5a. La suite du texte est intéressante :
"...Et s'il ne trouve pas de faute expliquant la situation dramatique (cf le commentaire de Rachi), il devra l'expliquer par la négligence de l'étude de la Torah.
(6) Traité Yom p. 9b. Il s'agit du Second Temple. Le premier Temple fut détruit pour trois raisons . . l'idolâtrie , l'immoralité et le meurtre. -

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Une lumière cachée
Nous vivons durant cette période le souvenir de la destruction des deux Temples de Jérusalem, dont la dernière conduisit le peuple juif en exil. L'exil évoque, dans une première approche, la conséquence négative des fautes du peuple juif. "A cause de nos fautes nous fûmes exilés de notre terre" affirmons-nous dans nos prières (1). Pourtant nous trouvons dans le Talmud une déclaration surprenante. L'Arche sainte qui contenait les Tables de la Loi était surmontée de deux chérubins. Lorsque Israël se conformait à la Volonté du Créateur les deux chérubins se tenaient enlacés, mais lorsque le contraire se produisait, ils étaient dos à dos (2). Or quand les ennemis d'Israël pénétrèrent dans le Saint des Saints, l'endroit où l'Arche sainte était entreposée, les chérubins étaient face à face (3) !
La violation d'un lieu aussi saint traduisait la défaillance spirituelle d'Israël (4). Comment dès lors les chérubins pouvaient-ils être enlacés ?
L'exil est une rupture. Un moment de l'Histoire juive où la connexion entre D.ieu et son peuple ne s'établit plus et où la relation de cause à effet des événements n'est plus évidente : le destin juif devient plus difficile à assumer. Mais nous comprendrons mieux le sens et la finalité de l'exil à l'aide d'une parabole nous décrivant les rapports d'un maître à son élève.
Lorsqu'un maître explique une idée à son élève, il tente du mieux de ses capacités de lui faire comprendre chaque détail de l'idée. Son engagement intellectuel est alors total. Cependant si alors survient dans son esprit l'ébauche d'un développement nouveau, il est obligé d'y apporter toute son attention pour ne pas la perdre, ce qui entraînera un affaiblissement de l'intensité de son rapport avec l'élève. Et plus le maître se concentrera sur l'éclair nouveau plus sa relation avec son élève s'affaiblira. Bien plus, ce phénomène de distanciation s'amplifiera à mesure que l'idée se construira et s'enrichira, au point de créer une sorte d'exil entre le maître et l'élève.
Un mal pour un bien
En fait ,on comprendra qu'il s'agira là d'un "exil" apparent sans dimension profonde réelle car si le maître concentre toutes ses facultés intellectuelles sur l'idée nouvelle ce n'est que pour mieux la révéler par la suite à son élève. De plus cet exil, par sa densité, est l'indice que l'idée que le maître a perçue est tout aussi importante et qu'elle mérite un éloignement provisoire du maître. Ce qui nous permettra de comprendre la finalité de l'exil spirituel du peuple juif. Bien qu'extérieurement il y ait effectivement "exil" cette situation n'est en quelque sorte que la phase préparatoire à la révélation divine que le "Machia'h" (le Messie) amènera. Ce principe explique d'ailleurs la raison pour laquelle l'exil n'est pas seulement une expiation de nos fautes. Si tel était le cas la rigueur de l'exil s'atténuerait avec le temps , Or nous voyons précisément le contraire . L'obscurité spirituelle s'intensifie un peu plus chaque jour. A l'instar de la période qui précéda la sortie d'Egypte : au fur et à mesure que la délivrance approchait, par l'entremise de Moché (Moïse) auprès du Pharaon, l'oppression s'accentuait. "Depuis que je suis allé chez Pharaon pour parler en Ton nom, il a fait du mal à ce peuple..." (5), s'étonna Moché devant D.ieu.
Ne pas désespérer
Cette obscurité spirituelle si forte aujourd'hui nous révèle deux choses : d'une part, la proximité de la délivrance et d'autre part le fait que cette délivrance sera porteuse d'un dévoilement divin bien plus élevé que n'importe quelle époque. C'est pourquoi les chérubins posés sur l'Arche sainte étaient face à face lors de la destruction du Temple. L'Arche sainte était placée à l'endroit le plus saint du Temple, le lieu, où réside (dans ce monde) l'Essence divine c'est-à-dire la réalité des choses. De ce point de vue-là, l'exil qui commençait n'était pas fondamentalement négatif Il n'était qu'un voilement provisoire de la Présence divine en vue d'une révélation plus intense encore, traduite par la position des deux chérubins. Ce dernier point constitue un merveilleux encouragement pour notre génération. La difficulté de la vie juive propre à notre époque, comme nous le notions plus haut, pourrait nous amener à désespérer de voir la venue du Machia'h. Pour dissiper un tel sentiment nous devons nous rappeler que l'obscurité grandissante de ce dernier exil est l'assurance qu'il touche à sa fin.
Notes .
(l) Prière de Moussaf des <trois fêtes".
(2) Traité Yoma p. 54a.
(3) Traité Yoma p.54b.
(4) Mais pas la puissance de ses ennemis.
(5) Chemoth chap.5, verset 23.

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L'attente fébrile du Machia'h
Ce Chabbat aura un cachet particulier puisqu'il tombera le 9 du mois de Av, jour anniversaire de la destruction des deux Temples de Jérusalem. Et plutôt que de réfléchir sur un thème de notre Parachah nous vous proposerons aujourd'hui deux réflexions sur le sujet du Machia'h. Le Midrach nous dit en effet que le Machia'h est né le jour de la destruction du Temple, affirmation qu'il nous faut comprendre au second degré : malgré son caractère tragique, la destruction du Temple est aussi le prélude à l'avènement messianique. Depuis cette date chaque jour nous rapproche un peu plus de la venue du Machia'h.
Concernant le Machia'h, nous avons deux obligations : croire en sa venue et l'attendre. <Quiconque n'y croit pas, écrit le Rambam (Maïmonide), et n'attend pas sa venue, ce n'est pas les prophètes qu'il conteste mais la Torah elle-même et Moché (Moise) notre Maître..." (1).Que signifie pour nous cette nécessité de "l'attendre" ? On peut croire dans l'imminence d'un événement tout en s'en désintéressant. L'attente introduit une composante supplémentaire dans cette croyance : c'est scruter l'horizon avec fébrilité pour voir que cette foi prendra corps. Bien plus, celui qui attend quelque chose d'important mettra tout en œuvre pour réduire cette attente. C'est sur ce point que se cristallise la notion de foi en la venue du Machia'h. Cette attitude se retrouve chez le Hafetz Haïm (2) l'une des plus grandes autorités du début du siècle qui marqua cette attente dans de nombreux détails de sa vie.
Les talons du Machia'h
Selon lui, le drame de la foi messianique résidait dans le fait que le peuple juif n'attendait pas le Machia'h. "Nous nous trouvons actuellement, expliquait-il, dans l'époque ~, des talons du Machia'h" (3) et avant sa venue il faut tout réparer". Il instaura dans sa Yéchivah, pour cela, l'étude des traités talmudiques ayant trait aux sacrifices afin d'être prêt dès que le Temple serait reconstruit. "Le mérite de l'étude de ces traités, précisait-il, activera la venue du Machia'h".Sa préoccupation était telle qu'il demandait souvent à ses visiteurs, s'ils parlaient du Machia'h dans leur communauté rappelant cette parole du Talmud selon laquelle lorsque l'homme passera en jugement à la fin de sa vie on lui demandera entre autres s'il a attendu le Machia'h (4).
Intensifier l'étude
Aujourd'hui le Hafetz Haïm n'est plus là pour aiguiser notre foi et notre attente, mais, grâce à D.ieu, le Rabbi de Loubavitch de ce point de vue-là, assure la continuité. Dans la période troublée que nous vivons actuellement il est le seul dans le monde à ne centrer ses discours que sur l'imminence de la venue du Machia'h et à exhorter chacun d'entre nous à intensifier notre étude de la Torah pour précipiter sa venue. Dans cette perspective, il a demandé de consacrer un temps à l'étude des sujets relatifs au Machia'h. "Nous sommes sur le seuil de la délivrance ", a-t-il expliqué le Chabbat de la Parachah Balak, signifiant par-là que l'urgence de la situation nous commandait d'agir. Or depuis Avraham, le Juif ne possède qu'une seule arme d'action . l'étude de la Torah. Que D.ieu fasse qu'avec ces bonnes décisions nous méritions de voir rapidement le Temple reconstruit.
Notes
(1) Michné Torah, Lois des Rois, chap. 11, parag. 1.
(2) L'une des plus grandes autorités de la fin du siècle précédent et du début du siècle (1835-1933). ,
(3) Expression évoquant la proximité de l'échéance messianique.
(4) Traité Chabbat p. 31a.

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