Les fêtes juives
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Hannoucah au Népal.
Un article de Hanni Lifchitz, Népal.

Une semaine avant Hannoucah.
Nir entre dans le Beth 'Habad, vêtu comme un moine bouddhiste, le crâne rasé. Il inspecte du regard chaque coin du Beth 'Habad, chacun des groupes d'Israéliens qui s'y trouvent: les uns affalés sur les fauteuils, ceux qui sont dans le coin ordinateur et télécommunication, ceux qui sont à la cafétéria et ceux qui sont dans la synagogue.
"Je ne suis pas venu ici pour me promener, lâche-t-il avec enthousiasme à qui veut l'entendre, je suis venu au Népal pour chercher quelque chose.
Cela fait des années que j'en rêve, je suis venu pour me recueillir et méditer dans le célèbre  monastère de Kopan. (C'est un monastère bouddhiste à l'Est de Katmandou, perché sur une montagne qui surplombe toute la vallée de Katmandou. Il s'y trouve plus de 300 moines, adonnés à l'étude, la méditation et l'adoration de diverses idoles).
Je dois m'y rendre dès demain, et compte bien m'intégrer à cette communauté".
Nir nous regarda d'un air satisfait, comme pour déceler en nous une réaction.
Nous nous contentâmes de sourire, et lui proposer de s'installer sur un des fauteuils dans le coin où allait commencer un cours de Rav Hezki.
Nir refusa poliment. Il est venu ici parce qu'il est fatigué, qu'il a mal aux pieds et que son hôtel est encore fermé. Il se prépare cependant un thé, près des fauteuils où le cours a commencé, et nous le sentons s'approcher progressivement du cercle où a lieu le cours.

Non, rassurez-vous, il n'écoute pas un cours de 'Hassidouth, juste il attend que son thé soit moins chaud…
Ce soir là, le cours porte sur le chapitre 32 du Tanya. On y apprend le lien profond qu'il y a  entre une âme juive et l'autre "et c'est pourquoi tous les juifs sont appelés des frères, de par la racine de leur âme, et seul le corps marque la distinction entre eux".
Nous discutons longuement sur le lien indéfectible qui existe entre deux juifs, en toutes circonstances, et comment un juif peut être le bon "envoyé" pour aider et partager avec un autre juif.
Lorsque Rav Hezki commence son histoire, Nir vient s'asseoir sur un fauteuil. Non, il a juste mal aux pieds….

L'histoire de Schmelke commence dans son village de Pologne, il y a deux cent ans. Schmelke  n'a pas un riche beau-père qui veille sur sa famille et lui laisse le loisir de s'adonner à l'étude, ni une bourse de pièces d'or cachée sous les lattes du plancher. Non, il bosse du matin au soir, et, le soir il vient rejoindre sa femme qui tient d'une main ferme un débit de boisson.
Lorsque le dernier ivrogne a quitté les lieux, les voilà à compter les quelques pièces économisées ce jour, qui serviront un jour à marier Zelda, leur fille aînée. Un cérémonial ponctué de soupirs comme pouvaient en pousser des juifs d'une Pologne d'autrefois où il n'y avait rien à manger, rien à travailler, rien à espérer même et surtout pour un juif.…
Rien d'étonnant à ce que le moment venu, ils n'avaient toujours pas d'argent pour marier Zelda, et Schmelke fut prié par sa femme de visiter villes et villages lointains jusqu'à rapporter de quoi marier la grande.
Le voyage fut long, exténuant, et ne rapporta pas grand chose. A tous, Schmelke débitait sa pauvre vie, ses dettes, son village, sa grande à marier, les exigences de la famille de son futur, etc…Même lorsqu'il arrivait à émouvoir un autre juif, guère mieux loti que lui, c'était pour quelques pièces de cuivre. A peine de quoi réparer ses chaussures qui baillaient l'une plus que l'autre.
Il faisait bien chaud ce jour là, et Schmelke avait bien soif. Il s'assit à l'ombre d'un bosquet, porta son outre à ses lèvres pour étancher sa soif.
Tiens, des gouttes de sueur qui lui coulent dans le dos. Une sensation insupportable et il se gratte de son mieux, mais en vain. Ni la main droite en haut ou en bas, ni la main gauche n'arrivent à chasser cette sensation irritante. Tiens, pourquoi pas cet arbre, au tronc si large et accueillant? Il s'en approche, s'adosse et commence à se gratter le dos. Mmmhh! Quelle sensation de bonheur! Mais se rend il compte qu'il est au milieu du parc de la résidence royale, et que cet arbre en est le joyau; l'arbre chéri du roi?
De sa fenêtre, Sa Majesté a aperçu le manège. Schmelke est vite amené par les gardes devant le Roi, et comprend ce qui risque de lui arriver.
"Je n'ai rien fait de mal, j'aime le Roi. J'avais juste besoin de me gratter le dos, car je suis fatigué d'errer de ville en ville pour ma fille, la pauvre, qui attend que je lui trouve de l'argent pour pouvoir se marier, c'est ma femme qui m'a envoyé, elle m'a dit que nos frères m'aideraient, mais vous savez Majesté, je n'ai rien fait de mal, j'aime le Roi. J'avais juste besoin de me gratter le dos, car je suis fatigué d'errer de ville en ville pour ma fille, la pauvre, qui attend que je lui trouve de l'argent pour pouvoir se marier …."
Tais toi! ordonne le Roi. Tu as besoin de combien d'argent pour ce mariage? Cent pièces d'or? Gardes, prenez cent cinquante pièces d'or de mon trésor et donnez les à ce juif, qu'il déguerpisse d'ici et ne revienne pas se frotter à mon arbre!
Ce fut un beau mariage. Si tous se demandèrent d'où Schmelke avait apporté tant d'argent, le secret ne tint pas longtemps, et ils furent nombreux  à rêver d'aller se gratter aux arbres du Roi.
Seuls Zevouloun et Moïchke, deux charretiers, décidèrent de concrétiser leur rêve.
Vêtus de leurs longs manteaux noir usés par le soleil et la pluie, coiffés du plus vieux chapeau qu'ils aient pu trouver, et après l'avoir piétiné consciencieusement, après avoir déchiré leurs vieilles chaussures, ils se mettent en route, droit vers la capitale et le jardin royal. Difficile de ne pas voir cet arbre gigantesque au milieu du jardin. Les voilà tous deux se frottant le dos avec application sur le tronc royal, souriant à l'avenir radieux qui les attend lorsqu'ils reviendront les poches pleines. Las, le roi n'était pas à sa fenêtre, et ils avaient le dos bien meurtri et le manteau déchiré lorsque sa silhouette apparut à la fenêtre.
"Quoi, encore! Deux! Amenez les moi de suite…"
Et les deux, la tête basse:
"Majesté, nous sommes deux simples juifs de votre royaume. Nous sommes pauvres, gagnons péniblement de quoi nourrir notre famille, et nous avons chacun une fille à marier. Voici des semaines que nous errons de ville en ville, pour amasser le nécessaire. Mais il fait tellement chaud, et le dos nous grattait, alors nous nous sommes approchés de cet arbre pour nous soulager…"
"Pendez les immédiatement sur cet arbre" rugit le roi.
Zevouloun et Moïchke se regardent stupéfaits.
"Mais pourquoi? Schmelke notre ami a reçu cent cinquante pièces d'or il y a un mois après s'être frotté sur cet arbre, et nous, nous serions pendus?
Etes vous idiots à ce point?  demande le roi. Ne voyez-vous pas la différence? Il y a un mois, le type était tout seul. Personne pour lui gratter le dos et le soulager. Mais vous auriez pu vous gratter l'un l'autre!"

L'histoire se termine, et Nir quitte son fauteuil tout songeur. Visiblement, il ressasse dans sa tête tout ce qu'il vient d'entendre.
"C'est pourquoi tous les juifs sont appelés frères, de par la racine de leurs âmes. Seuls les corps en sont séparés"
Cette vision de l'unité d'un juif et un autre lui plaît, et lui ouvre un horizon inexploré. Aura-t-il l'occasion de venir gratter le dos d'un autre juif?
Avant de partir, nous lui donnons une Hannoukiah et des bougies. "Dans une semaine, c'est Hannoucah. Où qu'il se trouve, et quelle que soit sa situation, un juif doit se souvenir qu'il est juif, et que sa mission dans le monde est d'y faire résider la lumière".
Nir accepte la Hannoukiah et jette un long regard sur Rav Hezki.

C'est un an après que nous avons appris la suite de l'histoire. Le premier soir de Hannoucah, nous étions prêts à la grande fête: décorations, beignets au sucre et bourrés de confiture trônent sur la table centrale. Des centaines de touristes sont déjà là et attendent que nous allumions les bougies, lorsqu'un jeune israélien en jean et en chemise pousse la porte du Beth 'Habad.
"Vous vous souvenez?"
Nir!
Comment ça va? Voici des mois que je me promène en Asie. Ces derniers mois j'étais en Inde, mais je me suis dit que le meilleur endroit pour Hannoucah ce serait au Népal. "
Et de s'enflammer:
"L'occasion de refermer la boucle, venez, je vais vous raconter.
Les cours à Kopan étaient somme toute intéressants, mais je n'ai pas partagé toutes ces idées. J'avais décidé de rester quand même jusqu'à la fin du programme.
Quelques jours après mon arrivée, j'ai remarqué un des moines bouddhistes qui avait une tête d'occidental, et j'ai décidé d'entrer en contact avec lui. A ma grande surprise, il m'a répondu en hébreu!
Eythan se trouvait dans ce monastère depuis plusieurs semaines. Il y était arrivé directement depuis l'aéroport de Katmandou, en évitant soigneusement tous les lieux fréquentés par les Israéliens. Il cherchait avant tout le calme et la réflexion, le repos. Dans ce monastère, il comptait rester une bonne année, pour bien faire le vide. Oublier des parents inquisiteurs, des amis futiles et volages, une vie remplie de points d'interrogation. Il était persuadé que Bouddha avait des réponses à lui apporter.
Deux jours plus tard, j'étais dans ma chambre, face à la Hannoukiah et au message qui l'avait accompagnée:
"Où qu'il se trouve, et quelle que soit sa situation, un juif doit se souvenir qu'il est juif, et que sa mission dans le monde est d'y faire résider la lumière".
Que peut il m'arriver si j'allume ici les bougies de Hannoucah? Ce n'est pas pour ça que je vais faire Téchouvah, n'est ce pas?
Un instant plus tard, j'étais à la porte de Eythan. "Ce soir c'est le premier soir de Hannoucah! Je suis juif, tu es juif, viens, on va allumer ensemble".
Eythan me jeta un regard réprobateur. Apparemment je n'avais rien compris à sa vie! Peu importe, moi j'avais en tête l'histoire entendue au Beth 'Habad  et le cours sur le chapitre 32 du Tanya: Eythan est juif, c'est mon frère!
Je sortis les bougies de ma poche, tendis la feuille avec les bénédictions à Eythan. Mettons un peu de lumière dans le monde, Eythan. Après une longue hésitation, Eythan hoche la tête.
Après avoir allumé, j'ai commencé à lui raconter l'histoire de Schmelke, puis le cours entendu au Beth 'Habad.
Eythan buvait ces mots, sans désapprouver. Au bout d'un certain temps, je me suis assoupi. Au réveil, Eythan était debout, scrutant le message des bougies et pleurant silencieusement.
Nous nous rencontrâmes ainsi chaque soir de Hannoucah. Eythan semblait de plus en  plus songeur. Jusqu'au jour où il remit son sac sur le dos et quitta le monastère.
Il y a un mois, j'ai reçu un mail de lui.
Il me dit que depuis notre rencontre sa vie a totalement changé. Il me remercie d'avoir été le catalyseur de cette lumière que Hannoucah  a allumé en lui. Il observe maintenant les Mitsvoth, et vient de s'inscrire dans une Yéchivah. "


Hanni Lifchitz, Thamel - Katmandou, Népal.

Traduit de
http://www.col.org.il/show_news.asp?34698

(lien rompu)